Economie de marché, Economie solidaire            Février 2013     Rémi KUENTZ

 

(Analyse de comparaison entre ces deux types d'économie faite par Rémi )

 

Partis il y a un an d’un geste simple et plaisant : acheter collectivement et directement des agrumes à des producteurs siciliens, nous découvrons, avec l’aide des réseaux italiens, que cette démarche a du sens et qu‘elle remet en cause de nombreux aspects  de l’économie marchande aujourd’hui dominante.

 

 Sans savoir très bien où nous allons, sans recettes pré établies nous voilà donc dans ce qu’on pourrait appeler « un engagement recherche » (M. Benassayag) ou plus simplement une expérimentation économique et politique.

 

 Avec le tableau qui suit (inspiré par celui d’A. Saroldi que vous pouvez trouver sur le site) nous voulons montrer ce qui dans l’action de Court Jus, en lien avec les Galline felici , nous paraît différent des circuits de l ‘économie classique et en quoi cette action s’appuie sur les principes d’une autre économie sociale solidaire et écologique. 

 

 

 

 

Economie marchande dominante aujourd’hui dans l’agriculture

      Ce qui se dessine à travers notre expérience Court Jus

 

Rencontre offre/demande

Se fait par le marché qui est censé se réguler par 2 forces contraires : vendre le plus cher/ acheter le moins cher.

Nombreux intermédiaires entre producteurs et consommateurs

 

    C’est par des réseaux que nous avons rencontré les Galline felici. Ces réseaux établissent des contacts directs entre producteurs et consommateurs dans une logique de collaboration et de réciprocité.

 

 

 

Prix et concurrence

 

La guerre de tous contre tous fait baisser les prix imposés aux producteurs (jusqu’à 5 ou 7 ct le kilo pour les agrumes) . Ceci favorise la concentration et aboutit à la disparition de l’agriculture paysanne.

  Les Galline felici  font la preuve que sans intermédiaires et avec un prix acceptable pour le consommateur il est possible de rémunérer correctement tous les facteurs de production (main d’œuvre comprise). En somme un prix juste !

« Concorrere » c’est courir ensemble disent le Galline qui cherchent à diffuser leur expérience en participant à la création d’un réseau d’économie solidaire des producteurs du Sud RESUD.

Dans une logique « Piccolo è meglio » Court jus choisit d’aider à la naissance de nouvelles association plutôt que de grossir.

 

 

Information, transparence

Il s’agit avant tout de publicité.

Sur les produits tout est opaque : provenance précise, traitements chimiques, conditions sociales de production, formation du prix .

    Les produits et les producteurs sont présentés (nous avons commencé à traduire les textes). Les conditions de production écologiques et sociales sont connues. La construction du prix est expliquée.

 

 

 

Gaspillages

C’est une véritable donnée du système. L’agroindustrie et la grande distribution ont imposé un modèle de produits, calibrés, sans tâches, résistant au transport etc… peu importe qu’ils soient insipides.

Il faut donc jeter beaucoup : tout ce qui est hors normes. Parfois il faut détruire des productions dans l’espoir de faire remonter les prix !

    La qualité des agrumes n’est pas définie par le calibre ou l’aspect mais par leur goût. Une productrice des Galline nous a raconté avoir été très émue la première fois qu’un acheteur (des GAS) a goûté ses fruits et les a appréciés.

 Le circuit court, la confiance établie entre producteurs et consommateurs permettent d’éviter le gaspillage d’agrumes de qualité dont l’image ne serait  pas vendeuse.

 

 

 

Autonomie

Parcellisation extrême du processus de production et de distribution. L’agriculteur est intégré dans un chaîne où il ne maîtrise plus rien mais assume l’essentiel des risques.

Son travail est déqualifié et son revenu dépend souvent des subventions. Le consommateur est isolé et passif.

    La filière courte redonne autonomie et qualification au producteur, elle fait du consommateur un consom’acteur. Les Galline felici ont pris en main la diffusion et la transformation de leurs produits (qui étaient auparavant vendus sur l’arbre). Cela diversifie leur travail et  chaque producteur joue un rôle dans le fonctionnement du consortium.

Court jus organise la distribution .

 

 

 

 

Relations

 

 

Elles s’établissent sur une base de rationalité et de rentabilité dans un but de profit maximal.

    Il y a un plaisir de la rencontre qui redonne du sens aux différentes activités. Les relations  sont considérées comme un « capital important » :

Pour les producteurs travaillant collectivement dans le cadre de la coopérative.

Pour les consommateurs qui acceptent de contribuer  à un projet collectif.

 Entre producteurs et consommateurs. Les galline felici effectuent de nombreux déplacements pour aller à la rencontre des consommateurs et ils les  accueillent volontiers sur place.

 

 

 

Légalité

Le secteur de l’agriculture est sans doute en Europe celui où le travail au noir, souvent dans des conditions scandaleuses pour les ouvriers, est le plus développé.

    En Italie où l’économie souterraine et la corruption sont très importantes les réseaux d’économie solidaire insistent beaucoup sur le respect de la légalité (contrat de travail, salaires, conditions de travail, fiscalité)

 

 

 

Démocratie

L’économie est considérée comme une mécanique autonome et un fin en soi. Elle échappe au contrôle du politique dont elle a pourtant grand besoin (institutions, formation, infrastructures..)

  Il s’agit d’une forme de réappropriation démocratique de l’économie, d’une reconstruction par le bas.

L’importance des relations ouvre un espace public de proximité qui permet une prise de conscience à partir d’une politisation du quotidien.

 

 Rémi KUENTZ Février 2013